1985 - 1999
"La musique et les arts en général, sont la voie suprême de l’exercice de la créativité de l’homme, et on doit commencer le plus tôt possible et continuer jusqu’à la fin de sa vie". (Iannis Xenakis, « Grandeur et misère de la musique contemporaine », Paris : Le Guide musical, 1974, p. 4-6)
Cette phrase souligne l’importance que Iannis Xenakis accorde à la refonte d’une nouvelle pédagogie adaptée aux possibilités de sa nouvelle façon de composer et d’envisager la musique dès le milieu des années 1970. Dans son esprit, cette volonté ne sera opérante que s’il parvient à concevoir un instrument capable de dépasser (ou d’ignorer) les barrières culturelles liées à tout apprentissage musical, pour permettre au plus grand nombre d’accéder à la composition musicale, tout en réintégrant profondément la musique dans l’activité sociale.
C’est pourquoi en 1985, la Direction de la Musique (Ministère de la Culture) sous l’égide de Maurice Fleuret, décide avec Iannis Xenakis de créer Les Ateliers UPIC où Alain Després, nommé directeur, aura pour charge de systématiser ce travail de présentation, de promotion et d’initiation; à ce titre, les Ateliers UPIC (dotés alors d’une toute nouvelle version de la machine) organisent une dizaine d’ateliers de présentation d’une à trois semaines en France pour cette seule année. Ce travail de terrain est de première importance pour Iannis Xenakis car pour lui :
Par le biais de cette machine, un enfant peut dessiner n’importe quoi et l’entendre presque simultanément. Le dessin d’une maison devient ainsi une pièce musicale. Pourquoi les combinaisons de formes n’auraient-elles pas des équivalences sonores ? Les gens pourront donc écrire des partitions musicales par le biais du dessin, sans avoir aucune connaissance préalable. (Iannis Xenakis, « Des enfants de cinq ans composeront des symphonies », Paris : La Tribune, 30 juillet 1977, p. 17)
En confiant la promotion et le rayonnement de cette invention aux Ateliers UPIC, le CEMAMu poursuit ainsi activement ses recherches sur développement technique du système UPIC. Deux ans plus tard, il sera techniquement possible d’utiliser le système en temps réel : le CEMAMu sensibilise aussitôt l’équipe d’Alain Després à cette importante évolution technique.
A partir de 1987, Iannis Xenakis demande aux Ateliers UPIC de développer parallèlement à son activité de voyages promotionnels, une activité de studio (production d’œuvres) et de formation pédagogique : deux studios de composition ouvrent leurs portes à partir d’avril 1987 au parc de la Villette à Paris. Concernant la seule année 1987, Les Ateliers UPIC accueillent des compositeurs aux horizons esthétiques aussi variés que Pierre Bernard, François- Bernard Mâche, James Harley, Peter Nelson, Julio Estrada, Richard Barrett, Jean-Claude Eloy ou encore Alain Lithaud. Leur production musicale autour de l’UPIC donne lieu à toute une série de concerts en Europe, au Mexique, au Canada et aux Etats-Unis.
Avec les années 1990, le système UPIC fascine toute une nouvelle génération de compositeurs tels que Brigitte Robindoré, Takehito Shimazu, Nicola Cisternino, Gerard Pape, Angelo Bello et bien d’autres. La version temps réel est pleinement exploitable, la table à dessin et le stylo optique sont progressivement remplacés par l’écran et la souris, puisque l’UPIC est porté sur le système Windows, dès 1991. Durant cette période, des compositeurs tels que Jean-Claude Risset ou Daniel Teruggi, issus tous deux d’une longue expérience de la synthèse sonore et de l’approche acousmatique, ont utilisé cette machine en se l’appropriant facilement.